Note générale :
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Fatoumata Diawara reste sans nul doute le secret le mieux gardé de la musique d’Afrique de l’Ouest : la jeune femme a débuté sa carrière d’actrice voici plus de quinze années au côté de Cheick Oumar Sissoko, goûté aux planches des Bouffes-du-Nord dans le rôle d’Antigone, intégré la très considérable troupe de Royal de Luxe, collaboré aux albums de rien moins que Dee Dee Bridgewater et Oumou Sangaré, et prêté voix et plastique à la comédie musicale Kirikou et Sangara. En guise de mignardises, elle a croisé au gré des studios ou sur scène Herbie Hancock, Afrocubism, et Hank Jones. Ennoutre, elle est très belle.Pourtant, Fatou est son tout premier album en nom propre, une production pour laquelle elle a tenu à assurer, non seulement le chant principal, mais également les compositions, et les arrangements, choeurs, et percussions. Et c’est ce qui transparaît dès la première écoute de ces douze chansons : Fatoumata Diawara s’y trouve rayonnante et impériale, au centre précis de ces rythmes induits, la plupart du temps simplement soutenus par quelques instruments aussi acoustiques que modestes (tout au plus soulignera t’on la présence d’un clavier Fender Rhodes ici, d’un luth ngoni là), et une guitare d’accompagnement – partie assurée par la dame en personne – séminale et intuitive. Certes, on identifiera aisémentnla longue lignée d’artistes à tête bien faite et pleine dans laquelle s’inscrit l’Africaine : de Tracy Chapman à Joni Mitchell, en passant par Joan Baez, elles sont finalement bien peu à être parvenues à maîtriser un univers entier simplement grâce à six cordes pincées. La néophyte s’inscrit avec déterminisme dans cette lignée, qu’elle chante la problématique de l’éducation des enfants (" Sowa "), la place de la femme dans ce continent – statut qui reste encore à conquérir – avec " Bissa ", ou l’excision (" Boloco ").Mais le plus remarquable reste que cet art de la spontanéité renvoie en écho aux plus belles pulsions du funk, à la profondeur d’un folk décharné, et au grand chambardement swing du jazz, et ce sans caractère démonstratif superfétatoire, dans une extrême chaleur humaine, et un naturel parfaitement exemplaire.Un chant où perle un sourire de chaque instant, une simplicité qui n’exclut pas la plus pertinente des profondeurs, et un instinct assuré, qui soutient tout du long des vocalises exemplaires de sobriété : Fatoumata Diawara n’a pas tout d’une grande. C’est une grande.
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